Îlots de chaleur urbains : comprendre le phénomène
Pourquoi fait-il plus chaud dans certaines parties de la ville ? L'explication tient en trois lettres : ICU, pour îlots de chaleur urbains.
Climatologie urbaine - Montpellier
Résumé du projet
Problématique client
- Comprendre les phénomènes de canicule en ville
- Identifier et analyser les disparités thermiques
- Disposer d’éléments objectifs pour caractériser les ilôts de chaleur
- Communication et sensibilisation du grand public
Solutions Kermap
- Analyse des images satellites thermiques
- Observation des gradients de température à l’échelle de l’agglomération
- Carte de thermographie
- Mode d’occupation du sol Climat
- Inventaire de la végétation
Pourquoi fait-il plus chaud dans certaines parties de la ville ? L’explication tient en trois lettres : ICU, pour îlots de chaleur urbains.
En centre-ville et dans les espaces urbanisés on observe une élévation des températures au sol et dans l’air par rapport aux périphéries. Les différences entre le centre-ville et ses alentours peuvent atteindre les 10°C. Elles ont pour conséquences la création de dômes thermiques qui vont abriter des microclimats artificiels. Ces disparités thermiques peuvent être mises en évidence grâce à une thermographie satellitaire. En analysant les images satellites, on observe les gradients de température de surface diurnes et nocturnes d’un territoire. Ces études permettent d’identifier, à l’échelle d’une ville ou d’un quartier, les îlots de chaleur et de fraîcheur et d’en comprendre l’origine.
Liés à la configuration de l’environnement urbain et à la chaleur dégagée par les activités humaines, les îlots de chaleur ont des conséquences néfastes nombreuses pour l’Homme et l’environnement. Risques pour la santé, menaces pour la biodiversité, sensations d’inconfort, les îlots de chaleur posent aussi des questions d’adaptabilité de nos infrastructures. En effet, beaucoup d’aménagements n’ont pas été conçus pour lutter contre la chaleur. Cercle vicieux, certaines installations de confort comme la climatisation accentuent le phénomène en évacuant la chaleur à l’extérieur. De réelles solutions existent et doivent être mises en place pour pallier ce phénomène qui va s’accentuer dans les prochaines années.
En effet, les villes doivent faire face à l’augmentation du nombre de vagues de chaleur, de leur durée et de leur intensité, comme l’a illustré l’épisode caniculaire de 2019. Améliorer la qualité de vie urbaine et maintenir l’attractivité, ce sont les défis de demain pour les collectivités d’aujourd’hui.
Chaleur en ville : des facteurs très divers
Pourquoi certains points chauds observés de jour persistent sur la thermographie nocturne tandis que d’autres disparaissent ? Cela est en partie dû à la minéralisation des sols et aux propriétés thermiques des matériaux utilisés dans la construction et la voirie. Les espaces goudronnés comme les parking, les hangars, les rues stockent l’énergie le jour et la restituent la nuit sous forme de chaleur. Chaque surface a une capacité de réflexion de la lumière différente qui peut être mesurée grâce à un indicateur : l’albédo.
En se basant sur la couleur et la rugosité d’une surface, l’albédo permet d’attribuer un indice entre 0 et 1 ; plus l’indice est important, plus la surface est capable de renvoyer la lumière incidente vers l’atmosphère. Par exemple, une route goudronnée a un albédo faible, entre 5 et 10% tout comme un toit sombre. Au contraire, des murs peints de couleurs claires renvoient entre 50 et 90% de la lumière incidente. C’est d’ailleurs au niveau des pôles que celui-ci est le plus intense, la neige pouvant réfléchir jusqu’à 90% de la lumière.
Si connaître l’occupation du sol est essentielle pour comprendre le phénomène d’îlot de chaleur, l’orientation des rues, la configuration et la densité des espaces sont aussi à prendre en compte. Par exemple, les rues étroites ne favorisent pas la circulation de l’air qui va stagner par temps clair et augmenter l’effet de chaleur. Autre paramètre : la superficie de deux espaces homogènes. Les grandes surfaces imperméabilisées ont des températures de surface plus élevées que les petites surfaces de même nature.
Enfin, la concentration des activités humaines est plus importante en ville que dans les campagnes. Industries, éclairage et transports participent à la hausse de la pollution et des températures.
Les îlots de fraîcheur : oasis citadin
Les espaces verts et les points d’eau en ville sont source de fraîcheur, de protection et de détente. Apport d’ombre, réflexion de la lumière, leurs bénéfices sont multiples. Par exemple, saviez-vous que placé stratégiquement, un arbre peut faire diminuer la température de l’air entre 2 et 8°C ? C’est en partie dû au phénomène d’évapotranspiration. Sous l’effet de la chaleur, les végétaux envoient de l’eau vers l’atmosphère par le sol et les feuilles, rafraîchissant ainsi l’environnement dans lequel ils se trouvent.
En séquestrant le carbone, arbres et plantes atténuent les effets du changement climatique et agissent comme un filtre contre la pollution en absorbant certaines particules fines dégagées par les activités humaines. La présence de végétation en ville réduit l’intensité des îlots de chaleur. C’est pourquoi différentes proportions d’espaces verts entre deux quartiers peuvent expliquer des écarts de température.
Ces deux thermographies mettent en relief l’un des îlots de fraîcheur de la ville de Montpellier : le Bois de Montmaur. De jour comme de nuit, le bois reste un lieu frais contrairement aux voies de circulation qui continuent de libérer de la chaleur la nuit.
Si végétaliser est crucial pour diminuer les effets des îlots chaleur, c’est toute la forme urbaine qui doit s’adapter et intégrer le climat dans ses aménagements. De la configuration du bâti, à sa hauteur, aux revêtements utilisés en passant par le passage du vent, les espaces ombragés et ensoleillés ; tous les composants de la ville doivent être considérés afin de trouver des solutions économes, écologiques et réelles. En privilégiant des matériaux laissant passer l’eau, on permet la filtration de composés dits polluants par les sols mais aussi la création de réserves d’eau utiles pour le développement des végétaux, surtout durant les périodes chaudes. Agir sur le trafic, encourager les mobilités douces, c’est en opérant sur plusieurs paramètres que l’on peut observer des changements significatifs.
D’autres solutions existent. Dans le sud de l’Europe, à New York ou encore à Brest on peint les toits des bâtiments en couleurs claires. Ces revêtements blancs permettent de faire drastiquement diminuer les températures de surfaces et de 3 à 7°C à l’intérieur des bâtiments. Si les avantages économiques et écologiques ne sont plus à prouver, reste à convaincre que l’identité régionale peut se trouver ailleurs que sur les toits.
D’après le GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), au cours des prochaines décennies, la température de surface terrestre pourrait croître de 1.1 à 6.4°C. La situation est urgente et attend des réponses qui le sont tout autant.
Îlots de chaleur à Montpellier : témoignage de Marc Aparicio
Marc Aparicio est responsable du service SIG – Observatoire de la DICOSIG au Département Développement et Aménagement durable du Territoire de la Métropole de Montpellier. Le service d’information géographique est un service d’expertise qui a pour objectif de mutualiser les données géographiques et de faciliter leur analyse et leur communication. Il met notamment à disposition des données géographiques sur des référentiels à échelles diverses.
Montpellier Méditerranée Métropole est exposée aux vagues de chaleur avec environ 29 jours par an affichant une température supérieure à 30°C pour une température estivale moyenne de 28.2°C (d’après les données de Météo France). Fin juin 2019, des records de température de 46°C sont enregistrés dans le Gard et l’Hérault. C’est dans ce contexte caniculaire que le service SIG de la Métropole consulta la société KERMAP afin de disposer d’une thermographie satellitaire homogène et cohérente sur l’ensemble de son territoire. L’analyse des images satellites thermiques permet en effet une première approche de l’observation des disparités thermiques.
Pour obtenir ces images, KERMAP a utilisé deux images satellites : une image LANDSAT 8 de jour acquise le 22 juillet 2019 et une image ASTER de nuit datée du 6 juillet 2015. La bande spectrale correspondant à l’infrarouge thermique a été exploitée de façon à observer les gradients de température à l’échelle de l’agglomération montpelliéraine. Les images ont été redécoupées selon la tâche urbaine. L’objectif étant de centrer l’interprétation des images sur le milieu urbain. Pour exprimer la température de surface en degré Celsius, KERMAP a appliqué un prétraitement aux images thermiques. Dans le cadre de cette analyse, le gradient thermique est exprimé en température relative pour observer l’amplitude thermique.
Pour Marc Aparicio, cette première cartographie a permis de commencer à appréhender globalement le phénomène de canicule sur le territoire de la Métropole de Montpellier et de faire un premier pas vers la compréhension du phénomène des îlots de chaleur. « Une carte permet de sensibiliser et de prendre conscience de façon objective d’un phénomène spatial et temporel que l’on appréhende souvent de façon subjective. On peut alors faire la relation, par exemple, entre les cartes de thermographie et la typologie des formes urbaines». Ces données permettent de faire évoluer la compréhension en interne du territoire et de développer des outils pédagogiques d’information et de sensibilisation. Les données ont par exemple été présentées au grand public lors du festival Métropolisme. KERMAP réalise un travail d’analyse mais aussi d’accompagnement dans la réalisation de ses prestations. Plusieurs modifications ont été faites tout au long du projet afin d’aboutir à un résultat répondant précisément aux attentes de la collectivité.
Les analyses des gradients diurnes et nocturnes identifient les espaces les plus chauds et les plus frais de la ville et mettent en lumière les zones d’inertie thermique de Montpellier. Ces espaces résistent aux changements de température contrairement à d’autres que l’on voit apparaître sur la cartographie comme points chauds le jour et la nuit. Ces zones accumulent l’énergie et la restituent sous forme de chaleur la nuit, empêchant la ville de se rafraîchir et nuisant au confort de ses habitants.
Deux autres prestations sont actuellement en cours, le mode d’occupation du sol Climat et la végétation. Elles ont pour objectifs d’affiner les connaissances du territoire et de définir plus précisément les zones à risque pour le phénomène d’îlot de chaleur urbain grâce à la méthode des « Locale Climate Zone (LCZ) ». L’inventaire existant sera complété par la végétation présente chez les particuliers et en périphérie afin d’obtenir des données plus justes sur la végétation en ville. Par ailleurs, l’une des finalités du projet est la plantation d’arbres au sein de l’agglomération.
Une fois validées, ces données seront mises à disposition de tous dans le portail Opendata de la Métropole.
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